L'Abeille

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Abidjan - 7 juin 2023

Quelle que soit l’heure à laquelle on atterrit, en sortant de l’aéroport on est immédiatement frappé par une énergie qui semble ne jamais s’évaporer. Que ce soit personnel ou professionnel chacune et chacun court. Certes, tout va vite, mais peu avancent. Les embouteillages sont une constante ou toutes les classes sociales se retrouvent. Du vieux tacot à la plus récente berline de luxe, les passes droits habituels de certains ne peuvent fonctionner tant le nombre de voiture surclasse la capacité des routes, et la résignation, l’attente, la patience sont les caractéristiques de chacun. Pour quelques kilomètres il faut anticiper car aucune option autre que celle dans laquelle on s’engouffre ne peut faire gagner les précieuses minutes que tous voudraient gagner. Dans certains quartiers le changement de propriétaires entraine des conséquences non anticipées. On pourrait citer le quartier appelé zone 4 qui a vu les Français partir au profit des Libanais. Pavillons arborés font place à immeubles bétonnés. Que faire de rues trop étroites pour une population trop nombreuse ? Peut-être que le remède écologique est là. A ne plus pouvoir se déplacer tant les temps sont longs pour quelques mètres, on ne sédentarise et on se fait livrer tout ou presque .

 

Ici plus qu’ailleurs, modernités et apparences s’opposent à l’authenticité et aux traditions. Parfois les clichés s’invitent chez les uns ou les autres, mais en dehors de celui qui ne fait que passer, personne n’y prête attention.  Un long fossé d’ignorance de pragmatisme sépare riches et pauvres, travailleurs et rentiers. On se côtoie mais on ne se voit pas.

 

L’ébullition est partout. On y construit des routes, des tours, des ports, des ponts… Des zones industrielles fleurissent a tous les coins de la ville. Des déchets s’entassent rapidement utilisés par quelques chinois qui prennent l’acier, des Libanais le plastique …, des pauvres les déchets des déchets. Presque rien ne se perd, beaucoup se crée, et presque tout se transforme. Les pluies abondantes nourrissent des restes d’une végétation luxuriante, lavent et noient les rues, déplacent des immondices, et par moment ont des effets dévastateurs sur ceux qui construisent avec ce qu’ils n’ont pas, avec ce qu’il reste.

 

Et si la ville jamais ne s’arrête, pour autant on trouve toujours à qui parler. Les maquis sont des lieux de rencontre plus ou moins fréquentables mais toujours accueillants. Les milliers, que dis-je, les millions de taxis, renforcés par une flotte croissante d’UBER nous déplacent pour quelques euros partout, et il est facile, mais cher de profiter des tous les plaisirs. Que l’on soit attiré par les sushis, les crêpes, les barbecues sauvages, un bœuf bourguignon…, un grand cru, a presque toute heure, on saura se satisfaire. Il est dit que les gastronomes et les noctambules n’arrivent pas à suivre le rythme d’ouverture des nouveaux lieux tant l’offre s’étend, tant la demande jamais ne se tarit.  

 

On peut aussi flâner le long de la lagune ou une surpopulation de bars offrent la reine Bière, le roi Whisky. Pour beaucoup l’apparat et l’apparent sont le plus important. La Société des Ambianceurs et des Personnes élégantes (SAPE) y a surement établie son siège social. Si nous connaissons plus le nom de sapeur ou si nous utilisons souvent le nom de « sape » pour qualifier nos beaux habits, ici la SAPE est un art de vivre, une nécessité. Il faut impressionner. Chaque fait et geste est calculé, préparé, murement réfléchi et mijoté. Que ce soit dans les quartiers pauvres ou l’on s’amasse, dans les quartiers riches ou l’on passe, il faut être vu. Dans les discothèques des quartiers aisés, on ne rechigne pas à bruler sa veste devant tous, en mettant en avant une marque de luxe. L’on reste indifférent, comme si cela est courant. Chez les moins fortunés, on se contente de regarder la vidéo de cet incendie éphémères sur les réseaux. On s’extasie, on critique. L’essentiel est là, on parle de celui ou de celle « qui a fait ».

 

A Abidjan, on trouve de tout, on y trouve tout. Les centres commerciaux poussent comme des champignons et les grandes marques s’installent. La culture, le sport et le luxe semblent trouver un terreau fertile et rien ne désemplit. Le flux d’acheteurs est constant, tout comme celui des petits voleurs, attirés par ces richesses qui les dépassent.  Il n’est pas rare d’observer de misérables gamins coursés par des agents de sécurité tout aussi pauvre, mais dont la survie peut dépendre du succès ou non de ces courses qui parfois n’ont pour but que de récupérer quelques biscuits.

 

Au-delà de la ville qui s’étend chaque jour un peu plus, paraît-il que la « révolution de la modernité » n’a pas encore eu lieu. Cependant, grâce à ses forces invisibles, les citadins jouissent de fruits et autres richesses (chocolat, noix…) qui font la fortune de certains tant sont prisées ces matières qui chaque jour embarquent vers des destinations lointaines, bien au-delà des frontières et des océans.

 

A bientôt

 

L’Abeille

 



29/07/2023
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