L'Abeille

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RDC – 7 août 2016 – Kinshasa

Laissez-moi commencer en vous contant l’histoire d’un policier se prenant pour un feu rouge…

 

Journée banale dans Kinshasa mais, comme tous les samedi matin, peu de trafic dans les rues, la majorité des hominidés récupérant des festivités de la veille. Me voilà traversant gaillardement la ville sur ma petite moto, évitant malgré tout les quelques taxis à la conduite aléatoire. Bref, rien d’exceptionnel, vous l’aurez compris.

 

Soudain, il se jette au milieu de la rue, interrompant le flux de véhicules, afin de permettre à l’un de ses congénères d’engager un vieux véhicule où le mot « police » est flanqué de chaque côté. Qui ça ? Mais, voyons, ce vaillant policier qui fièrement brave le danger en s’interposant devant tous. Mais le problème est qu’en agissant ainsi il faut parfois freiner dans l’urgence et se retrouver donc « nez-à-nez » avec ce représentant des forces de l’ordre. Ni une, ni deux, celui-ci, en se retournant et constatant ce qu’il qualifie d’infraction au code de la route, s’indigne d’une telle entrave à la loi. Car certes le feu rouge est en panne mais il est un « agent qualifié » chargé de faire respecter la circulation, puisqu’il « remplace le feu rouge ». Là-dessus, il montre sa baguette (bout de caoutchouc de la longueur d’un avant-bras) et menace, au cas où je n’arrête pas le moteur, de s’en servir. Il essaie lui-même d’enlever la clef de contact mais se heurte à la résistance de mes petits bras. S’ensuit alors des interminables palabres, où menaces s’alternent avec gentillesse, où argent se mêle avec loi et autorité publique se confond avec besoins personnels.

 

Bref, étant donné qu’il est un « agent qualifié », il a le droit de me mettre une contravention mais il préfère que cette dernière soit réglée sur place (dans une petite rue un peu sur le côté) ou d’aller au bureau de son chef mais, comme l’imprimante ne marche pas, il ne pourra pas me donner de reçu, et blablabla…. Ce n’est qu’au bout de vingt minutes que mon interlocuteur, comprenant que je ne suis pas pressé, finit par se lasser et me rendra ma liberté, déçu de ne pouvoir compter sur moi pour sponsoriser sa bière du week-end.

 

Continuons maintenant dans la description de l’intrépide volonté de certaines forces de l’ordre à vouloir faire respecter la loi, le droit et la sécurité publique, d’une manière bien à eux.

 

Les Congolais utilisent pour se déplacer de vieux minibus, de la taille de combi Volkswagen, dans lesquels s’entassent une vingtaine de personne. L’équipage de ces bus se compose d’un conducteur et d’un « receveur », chargé de collecter l’argent des passagers. Ce dernier, étant près de la porte d’accès, a donc les poches remplies de billets, ce qui en fait une proie évidente pour qui cherche de l’argent. Et donc, vous me voyez venir… Ou plutôt pas moi mais les hommes en uniforme bleu. Mais encore faut-il, pour chasser, être organisé. Et, comme tout bon prédateur qui se respecte, quand le gibier est gros, la meute anticipe. Les voilà, tapis près d’un carrefour, l’œil alerte, une moto prête à surgir et quelques policiers marchant nonchalamment le long de la chaussée. Lorsque le bus arrive, lent, suffoquant sous le poids de sa marchandise humaine, le receveur est à la porte, prêt à en libérer quelques-uns. Au moment où le véhicule s’arrête, l’attaque est parfaite. Trois policiers se saisissent du receveur, le jettent sur la moto et filent vers l’inconnu, le tout dans une indifférence déconcertante, sans que personne ne donne l’impression d’être surpris. Quant à la suite, j’imagine que le pauvre travailleur reviendra les poches vides de n’avoir pas su apporter de justifications à son travail et il en sera quitte d’une journée perdue.

 

Dans la même veine, il n’est pas rare que certains essaient de resquiller, en s’accrochant, à la volée, à l’arrière des minibus. Mais, le trafic étant ce qu’il est, dès que le véhicule ralentit, ils deviennent des proies faciles. Et toujours ces mêmes policiers ne se gênent pas pour les déloger, ce qui peut donner lieu à des scènes irréalistes, où un mini bus avance lentement, traînant trois ou quatre policiers, eux-mêmes agrippés au resquilleur, qui peut mettre parfois longtemps avant de se détacher, sachant qu’une fois entre les mains de l’autorité il devra vider le peu que ses poches contiennent ou, si elles sont vides, subir quelques réprimandes très sévères, accompagnées parfois d’un ou deux soufflets.

 

Voilà, en quelques mots, certains des maux d’un pays où, malgré tout, le flegme domine et personne ne semble surpris, voire amusé de ce qui arrive aux autres car, au final, une fois « l’affaire faite », le sourire reprend le dessus…

 

J’en profite pour vous partager une petite vidéo vous donnant un aperçu de ce pays, en espérant que le lien fonctionne : https://1drv.ms/v/s!AqRxptHdlK_mh59osa4bTli5mXyi-g. Le récit vous sera fait prochainement.

 

Des photos sont également en cours de préparation.

 

À très bientôt,

 

L’Abeille



07/08/2016
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