L'Abeille

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RDC – 31 janvier 2016 – Kinshasa

Parlons beauté ! C’est, comme dans toute société, un élément social et culturel des plus forts mais il est important de comprendre que la beauté n’est pas une donnée universelle. Ce qui est vrai chez nous (dans notre monde occidental) ne l’est pas ici. Commençons par le ventre. Alors qu’au nord de la Méditerranée, femme comme homme, on se bat pour que celui-ci reste le plus plat possible, avec si possible quelques ondulations qu’on appellerait des abdominaux, c’est ici tout l’opposé. Le « bidon » se doit d’être le plus arrondi possible (jusque dans une certaine mesure), afin de montrer qu’on est en bonne santé, qu’on a les moyens de se nourrir.

 

En été, nous nous massons sur les plages, non pas que « l’effet mouton » soit d’une attraction particulière, mais plutôt parce que nous cherchons à noircir notre peau, ce qui nous permettra ensuite, aux yeux des autres, de mettre en avant notre bonne mine. Là encore, l’opposition est flagrante. Bien que les hommes congolais ne puissent se targuer de quelques artifices de coquetterie, les femmes, quant à elles, disposent d’une quantité impressionnante de crèmes et autres poudres magiques qui n’ont pour vocation que de blanchir au maximum le visage. On ne compte plus les publicités ou promotions qui vont presque jusqu’à promettre des effets aussi efficaces en termes de blanc que la meilleure des lessives.

 

Mais ce qui est probablement le plus déboussolant reste le rapport aux cheveux. Comme il est facile de l’observer, la capillarité est un signe très distinctif et différenciant de nos peuples et il y a là une opportunité à saisir. En Occident, une coiffure ratée est synonyme de drame. Il faut attendre que le tout repousse ou, au contraire, raccourcir un peu plus afin de réparer le mal. Alors qu’ici, point de manière. Le marché du cheveu est omniprésent. Qu’on se rende sur les marchés, qu’on déambule dans les rues ou qu’on entre dans un salon, toutes les options et opportunités sont possibles. Mais, tout comme les crèmes blanchissantes, il s’agit d’une prérogative féminine. De quelques dollars à plusieurs centaines, on peut s’offrir les fameuses tresses africaines, les cheveux de Desirless ou Polnareff. Tout est possible sans aucune limite. Les habitudes ne sauraient exister car, en l’espace de quelques heures, c’est tout un visage qui peut changer et, les modes changeant aussi rapidement que notre monde, on ne saurait s’accoutumer à un style. Mais la diversité et la curiosité rendent ce quotidien des plus esthétiques.

 

Le football est, en RDC, plus qu’une passion, une réelle fenêtre sur le monde et un moyen pour ce grand pays de s’offrir une autre image que celles habituellement véhiculées. Quand la RDC joue, le monde s’arrête. Hier, match contre l’ennemi juré : le Rwanda. Les histoires de ces deux pays étant très fortement liées, ces frères ennemis s’affrontent dès qu’une opportunité est possible et le football n’y échappe pas. Autour de minuscules télés, branchées sur des batteries de voitures, au milieu des trottoirs, les foules s’amassent, hurlent, de joie ou de peur et vivent chaque seconde comme si c’était la dernière. Et, lorsque le coup de sifflet final annonce la victoire congolaise, c’est un pays qui danse. Sur le principal boulevard de Kinshasa, une clameur mugit des entrailles de la ville et, en quelques secondes, une marée de voitures, de bus et d’hommes se ruent dans le centre-ville. À défaut de drapeaux, car trop coûteux, on arrache les branches des arbres pour les agiter, on se couche au milieu du boulevard pour simuler un état de torpeur tel qu’on ne peut plus en bouger, les klaxons hurlent et les chants fusent. Le pays a battu celui qui, tous les jours, le défie sur d’autres contextes, parfois moins joyeux. Mais seul compte pour le moment cette victoire, qui offre quelques secondes de revanche qui, longtemps pendant la soirée, vont résonner au bruit des bières, des rires et des rêves.

 

À bientôt,

 

L’Abeille



31/01/2016
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