L'Abeille

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RDC – 23 octobre 2016 – Kinshasa

Reprenons le cours de notre dernière discussion : l’église et les croyances. Loin de moi la prétention de dire que ma connaissance est suffisamment forte en la matière, que ce que je vais écrire ci-après sont des dogmes.

 

Les croyances ici sont très profondes. Certes l’Église catholique est prédominante mais elle côtoie toutes les autres religions, dont les églises du réveil. Pourquoi mentionner spécifiquement ces dernières ? Car l’explosion de ces cultes est impressionnante. Dans les grandes villes comme dans les campagnes, partout ces églises prennent forment. Les pasteurs s’improvisent, quatre bout de tôle forment un lieu de culte et les autochtones se pressent, quel que soit le jour, vêtus de leurs plus beaux habits.

 

Certains qualifient les églises du réveil de « cancer de la société », d’autres d’un lieu où les pauvres peuvent « panser leurs plaies ». Le culte se fait à grands bruits. Le pasteur vocifère et arrange les fidèles. Ces derniers rentrent en transe, s’agenouillent, invoque un Dieu au travers de grands « Alleluiah » et donnent généreusement, ou devrais-je dire trop abondamment, le peu d’argent présent dans leurs poches trouées. Ces grands pasteurs sont étonnamment très riches. Ils promettent un quotidien meilleur, à des chômeurs de travailler, à des paralysés de marcher, à des aveugles de voir, à des familles nombreuses qu’un de leurs enfants sera ministre… Mais cela ne saurait se faire si la contribution n’est pas à la hauteur de ce qui est promis. Et chaque conseil individuel se paie en plus. S’il faut donner son avis sur une prescription médicale, le comportement de son conjoint (ou sa conjointe), un titre de propriété (quand il existe), ils sont là. Aucune profession ne leur est étrangère, tant que quelques billets pris à des personnes trop naïves alimentent leur tain de vie. Mais, quand on a quitté l’école que trop tôt, si l’on a eu la chance d’y aller, quand il n’y a rien à faire d’autre, quand la culture et la tradition s’opposent à ce que l’État préconise, la moindre personne qui sait lire un minimum et s’exprimer apparaît comme un érudit digne de confiance. Est-ce le signe d’un peuple trop crédible qui, à défaut de leadership, se réfugie dans ces prêcheurs de rêves ?

 

On peut également considérer que ces pasteurs y trouvent peut-être une solution pour eux-mêmes, à savoir avancer dans un monde où les repères disparaissent, où ils n’ont d’autres solutions pour vivre que de croire en un monde meilleur qu’ils cherchent à commercialiser.

 

Bien sûr, on peut aussi se rendre au bar du coin. Quelques chaises en plastique, une table de la même matière floquée d’un logo d’un brasseur national et le tour est joué. La rumba congolaise habillé empêche toute discussion, mais peu importe. Ce qui compte, c’est de s’asseoir, seul ou avec quelques connaissances, de refaire bruyamment le monde, au travers d’une gestuelle unique ou de s’isoler en tripotant sa bouteille de bière, L’animation citadine offrant un passe-temps suffisant. Mais, attention, les soirs où un match de foot est diffusé, tout change, surtout quand il s’agit de grands clubs européens.

 

Les quelques gargotes qui peuvent s’offrir un abonnement leur permettant de diffuser le match se retrouvent envahies. On se serre, on commande quelques bières à des serveurs qui passent plus de temps à chasser les non-consommateurs qu’à servir l’alcool tant convoité. Et, dès que l’arbitre siffle le coup d’envoi, chacun s’anime ! Chacun est un spécialiste, chacun pense qu’il aurait fallu faire différemment, chacun sait qui va gagner. C’est à qui criera son opinion le plus fort, c’est à qui saura s’imposer, c’est à qui sera déclaré comme le maître incontestable du foot. Parfois, les esprits s’échauffent tellement qu’il faut séparer les protagonistes mais cela fait partie de l’animation de la soirée.

 

À bientôt,

 

L’Abeille



23/10/2016
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