L'Abeille

L'Abeille

RDC – 4 – 8 février 2008

Bonsoir à tous,

 

On continue dans les nouvelles congolaises, même si vous commencez à connaître une grande partie de la vie et des anecdotes qui peuvent se passer ici...

 

Pour continuer après l'épisode de la dote, le mariage a enfin eu lieu. Mais, quand on est invité, il y a plusieurs choses à savoir. Déjà, l'heure en Afrique n'est pas la même qu'en Europe (et c'est une généralité). Je commence à comprendre ce que veut dire la maxime « Les européens ont l'heure et les africains le temps ». Après avoir reçu le faire-part la veille du mariage, j'ai pu lire les horaires suivants : 14 h à la commune pour le mariage civil et 18 h pour la fête. Comme tout bon mouzoungou qui se respecte, je me pointe à 14 h précise à la commune pour accueillir les mariés. 14 h 10 passe, 14 h 20, 14 h 30, rien. Je commence à m'inquiéter et téléphone au futur marié pour savoir ce qui se passe. Celui-ci me répond simplement qu'au Congo, quand on marque une heure de rendez-vous, il y a toujours un « grand décalage » entre l'heure affichée et l’heure d’arrivée. Ils ont une horloge différente de la nôtre.

 

Je prends mon mal en patience et, à 15 h pétante, une foule de personnes arrive, habillées de costumes on ne peut plus colorés mais, chose étonnante, avec six types de costumes différents. Je demande à un de mes amis pourquoi, et celui-ci m'explique qu'on célèbre trois mariages en même temps, et à raison de deux costumes par famille (celui de chaque famille). Le compte est bon... Pendant le mariage à la mairie, toutes les familles (les six) font la fête, chante et danse, sans s'arrêter. On entend à peine le bourgmestre faire prononcer les vœux aux époux (les six)... Au premier abord, c’est un peu surprenant, mais au final c'est vraiment chaleureux et tout le monde célèbre les mariés sans distinctions pour la famille de l'un ou de l'autre.

 

Le soir, on me prévient que le décalage heure affichée/heure congolaise est plus important que celui de la journée. Donc, au lieu de venir à 18 h, je me présente vers 20 h 30 et arrive dans les premiers, le dîner ne commençant finalement qu'à 21 h 30... L'ordre est un peu différent de celui qu'il y a en France, puisqu’on danse tout le temps et mange très peu, sans parler de la procession de cadeaux pour les mariés, qui finissent (les cadeaux) sur la table d'honneur (celle des mariés) ou on ne peut plus mettre une assiette ; les mariés entament leur première danse sous une pluie de billets donnés par les invités... Pour ceux qui connaissent mon déhancher légendaire, inutile de vous dire que j'ai fait fureur sur la piste : tous les regards étant braqués sur le seul Blanc qui, à mon avis et à en juger par leurs rires, ne devait pas avoir la même notion du rythme, ni la même gestuelle qu'eux... Moi qui pensais avoir du sang noir dans les veines... Et, à 3 h du matin, tout le monde au lit.

 

En parlant de mariages, on ne peut pas oublier les enterrements, car ceux-là aussi sont épiques. En dehors du fait qu'on chante et danse dans un esprit réellement joyeux, le plus incroyable reste le cortège funéraire. Quand les personnes ont de l'argent, ils affrètent une voiture genre minibus noir avec gyrophare et sirène (qui hurle tant qu'elle peut), avec un chauffeur qui, d'une main, tient le volant et, avec l'autre, une croix de deux mètres de haut qu'il dresse bien haute à l'extérieur du véhicule (par la fenêtre !). Le reste du véhicule est vide, le cercueil étant... sur une petite remorque à baldaquins. Le tout déboule à toute vitesse dans les rues de Lubumbashi, suivi par un convoi de voitures (ou camions suivant l'importance de la personne morte) et précédé d'un autre minibus équipé d'enceintes sur le toit diffusant de la musique. Et, là, c'est également la folie. Quand il y a des camions, les bennes sont pleines à craquer d'hommes et de femmes, les voitures idem (j'ai vu jusqu’à une douzaine de personne dans un 405 break, roulant coffre ouvert pour permettre à quelques bras et jambes de dépasser...).Quand les familles sont pauvres ou qu'on est dans des contrées un peu plus reculées, le principe est le même, sauf que le corbillard est un chariot poussé par des hommes et que les « voitures » qui suivent ne sont que des êtres humains, qui évoluent tout en chantant et dansant.

 

Voilà pour les festivités « collectives ». Voici maintenant un bref descriptif de la ville de Lubum (pour les intimes) et de mes conditions de vie en tant qu'expat’, ainsi que quelques petites notions politiques.

 

Dans l'ensemble, c'est une ville très agréable, assez développée grâce à d'importants gisements miniers, ville qui contraste complètement avec le terrain ou Kinshasa. Il ne faut pas non plus s'en faire une destination de rêve pour les vacances mais je m'y sens bien. Quelques routes goudronnées (mais certaines bien défoncées). Depuis une semaine, je me douche dehors sous la gouttière dès qu'il pleut car plus d'eau courante ni dans la citerne. Et, pour l'électricité, on est à l'économie, car la ville ne fournit plus depuis dix jours, donc on tourne sur le groupe électrogène... Pour se déplacer, en dehors de ma voiture, il y a les taxis collectifs (six à huit personnes dans une voiture type Mondéo) ou les minibus (soit vingt personnes dans une voiture à peine plus grande qu'un espace). On est serrés mais au moins on fait vite des connaissances...

  

Question sécurité, il faut être assez vigilant car, si en apparence tout est tranquille, ça peut partir en live à tout moment comme j'ai pu le constater deux ou trois fois. Et, là, il ne faut surtout pas traîner dans les parages.

 

Côté boulot, étant seul, j'ai l'avantage de pouvoir m'organiser comme je veux. En gros, les journées de travail commencent à 8 h pour se terminer vers 21 h, mais j'arrive à souffler le samedi et dimanche tout en bossant un minimum (envoi de fret ou transfert de personnes). Par contre, beaucoup d'ONG étant sur place + mes potes congolais, je vois pas mal de monde et les soirées sont plus que régulières... Je suis en train de développer un niveau international de tarot et Risk.

 

En ce moment, c'est un peu la panique sur Lubumbashi car une épidémie de choléra (c'est un des principaux fléaux sanitaire du pays) sévit, avec près de 200 nouveaux cas par jour. Avec notre implantation sur la ville, je suis très sollicité, bien que nous n'ayons pas de programmes prévus sur celle-ci, mais les acteurs locaux voudraient bien nous voir intervenir... Je commence à me rendre sur des sites contaminés pour voir les installations et faire des rapports, mais il faut avoir l'estomac bien accroché, car c'est là où l’on prend de plein fouet la réalité des choses... La saison des pluies battant son fort, les épidémies suivent tout autant...

 

Côté politique, c'est également un chaos sans nom... Tout est corrompu du plus bas au plus haut niveau, et on n’a jamais l'impression d'en voir le bout. On est sollicité constamment, que ce soit avec de l'argent ou des avantages en nature (je me suis fait harceler pour donner des calendriers de mon organisation). Les militaires et les policiers du « bas de l'échelle » essaient de prendre l'argent où il peut être, mais on peut presque le comprendre car ils ne touchent quasiment jamais leur salaires et vivent de ces pots de vins de tous les jours. Pour les ministres ou autres, c'est plus difficile à accepter car ils assèchent complètement le pays... Tout disparaît au fur et à mesure car l'argent prévu pour l'entretien ou d’autre chose passe directement dans les poches des hauts fonctionnaires...

 

On plaisante assez régulièrement sur l'article 15 de la constitution de la RDC qui dit : « Jouissez de votre fonction pour gagner votre vie. » Je traduis : démerdez-vous pour subvenir à vos besoins en vous servant de vos acquis et postes, et ne comptez pas sur l'état pour vous aider...

 

Pas facile à gérer tous les jours, mais on n'a pas le choix et, de temps en temps, ça donne lieu à des scènes assez comiques.

 

Pour la circulation en ville, après avoir conduit en Afrique, on peut dire qu'on sait conduire partout. J'ai eu un peu de mal à m'y faire au début mais, finalement, la conduite à l'oreille (uniquement au klaxon), rouler sur les piétons, s'imposer pour passer et ne pas respecter les quelques consignes de circulation me convient plutôt pas mal. Il faut aussi savoir que les rues sont des garages mécaniques. Pas de dépanneuses : on répare sur place. Je me suis retrouvé coincé deux jours par un camion qui avait cassé son moteur devant le portail, et pas question pour lui de bouger... Le chauffeur a tranquillement déchargé (pendant une demie journée) au milieu de la route toutes les briques qu'il transportait pour soulever celui-ci, démonté son moteur (toujours au milieu de la route et devant mon portail), travaillé deux jours et une nuit, rechargé, puis il est reparti comme si de rien n'était !

 

Dernier petit point… Je ne sais pas si vous avez entendu parler du 500 ? Moi non plus jusqu’à mon arrivée ici. Mais, une fois qu’on sait ce que c’est, plus possible de l’oublier… Il s’agit du whisky local. Et pourquoi ce nom ? J’y ai trouvé deux raisons… Après l’avoir goûté (ce que j’ai fait), soit on se dit que ce whisky fait 500 degrés, soit c’est parce qu’on se met à courir à plus de 500 km/h… Je n’arrive pas à imaginer d’autres raisons au regard de la couleur qu’à pris mon visage et de la chaleur qui s’est dégagée de tout mon corps après avoir bu une malheureuse gorgée…

 

Je crois que ça ira pour cette fois-ci.

 

L'Abeille

 



08/02/2008
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