L'Abeille

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Libye – 10 novembre 2011 – Tripoli

On entend partout que la vie reprend son cours normal ici. Mais c’est une sensation étrange que d'être dans un pays où il n'y a pas de gouvernement ni de loi. Chacun est entièrement libre de faire ce qu'il veut, sans contrainte, si ce n'est le regard ou la pression des autres. On s'installe au milieu de la chaussée pour jouer au baby-foot, on se fait traîner en roller par les voitures qui passent, et bien plus encore. Petites anecdotes du quotidien qui permettent de donner une saveur originale à chaque sortie. Bien sûr, ce ne sont là que les bons côtés, car cette absence (temporaire ?) de droit est aussi source de bien d'autres conflits.

 

Aïd vient de se passer. Sensation étrange que de déambuler dans des rues où, à chaque porte de maison, des moutons sont attachés, attendant d'être égorgés puis dégustés. Les enfants jouent avec, tandis que des camions entiers d'ovins débarquent dans Tripoli. Cette année, en raison du conflit, les prix ont flambé et il a fallu importer des moutons de Roumanie pour pallier au manque de ressources. Ceux-ci ont cependant moins la côte que leurs congénères libyens. Peut-être trop de laine et pas assez de viande... C'est également l'occasion pour les Libyens (et musulmans en général) d'avoir quelques jours de repos (trois), où l'on partage en famille le mouton, on visite et on invite. Pendant tout ce temps, on pourrait assimiler Tripoli à une ville morte. Pas ou peu de magasins ouverts, quelques taxis et un ou deux passants. Le reste est éteint. Il ne se passe rien, à part les « traditionnels » coups de feu, faisant maintenant parti du paysage courant.

 

Côté paysage, il faut quelques heures pour passer des ruines révolutionnaires de Sirt, aux ruines romaines de Subrata.

 

Pour les premières, on pénètre dans une ville fantôme. Plus un habitant, les maisons sont rasées par les combats et pluies d'obus, les rues jonchées de douilles. Quelques tuyaux éclatés inondent les rues d'eau, tandis que le silence régnant tout autour pourrait faire penser à un mauvais Western. Seul le vent s'engouffrant dans les rues anime cette ville que les humains ont laissée (pour le moment) à l'abandon. Partout les trous d'obus ou de balles ouvrent des fenêtres inattendues sur un ciel qui autrefois ne se voyait qu'en levant la tête.

 

500 kilomètres plus au nord, les ruines de Subrata, ville existant depuis plus de 2 000 ans, sont toujours aussi présentes, mais tout aussi vides. Les derniers touristes sont partis en février, et le guide rencontré sur place s'étonne presque de nous voir. Voici plus de huit mois qu'il n'a pas expliqué que le théâtre a été rebâti et inauguré par Mussolini, ou que Bacchus se prélassait dans son temple face à la mer. Non loin de là, les hôtels de luxe construits pour accueillir les flux de touristes sont vides mais le personnel, toujours impeccable, est là, sur le pied « de guerre », attendant l'étranger avec impatience, mais sans avidité.

 

Et, pour longer toute la côte, d'un point à un autre, une seule route, bordant la mer, traversant des déserts, qui ont comme seul point commun les chameaux présents partout. Source de nourriture, tout autant que les moutons, ils déambulent doucement le long des routes, certains n'échappant pas à de trop brutales rencontres avec les véhicules qui ne tiennent pas compte des limitations, qui n'existent que sur des panneaux.

 

Mais, source de communication, cette route, reliant autrefois Carthagène à Alexandrie (ce qui est toujours le cas aujourd'hui), permet de manger une pizza à Misrata, de prier dans une mosquée construite au bord de celle-ci, ou d'admirer le coucher de soleil au travers de champs d'oliviers, de palmiers, ou des montagnes Nafussa.

 

Quelques photos chargées.

 

À bientôt,

 

L'Abeille



11/11/2011
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